Explication détaillée quant à la réprobation publique du blâmable des détenteurs de l’autorité

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Question: votre éminence, il y en a qui disent que la réprobation publique du blâmable aux détenteurs de l’autorité fait partie de la voie des prédécesseurs. Et ils prennent comme preuve le hadîth d’Abou ‎Sa’îd l-Khudrî lorsqu’il réprouva l’acte de Marwân ben l-Hakam lorsqu’il devança le sermon à la prière (de l’aid) et sa parole ﷺ disant qu’ « il y aura des émirs dont vous agréerez certaines choses et en réprouverez d’autres. Celui donc qui déteste cela s’est innocenté, et celui qui réprouve cela est préservé» (ndT : nous avons mis le hadîth exact) et le hadîth « le meilleur des martyrs est un homme qui se dressa devant un souverain en lui ordonnant (le convenable) et en lui interdisant (le blâmable) et (le souverain) le tua». Cette parole est-elle correcte ?

Et comment concilier entre ces athars authentiques et sa parole ‎ﷺ « Celui qui veut conseiller le dirigeant, qu’il le fasse en secret et ne le fasse pas en public». Nous souhaiterions une explication détaillée sur ce sujet, puisque beaucoup de jeunes (dudit) éveil islamique en ignore le jugement correct. Et que plus particulièrement il existe des prêcheurs disant que « la réprobation publique du blâmable aux détenteurs de l’autorité fait partie de la voie des prédécesseurs ». Ce qui pousse les jeunes à la révolte, pensant que la non réprobation publique du blâmable serait une preuve de trahison dans la religion pour un intérêt (mondain, personnel…) etc.  Et du fait que ce sujet soit délicat, nous espérons un exposé détaillé. Qu’Allâh vous récompense en bien.

Shaykh Ibn l-Utheymîne : C’est une question importante et en réalité, sa réponse est plus importante encore. Il ne fait aucun doute que la réprobation du blâmable est une obligation sur tous ceux qui peuvent la remplir selon la Parole d’Allâh Tabâraka wa Ta’âlã {et que soit issue de vous une communauté qui appelle au bien, ordonne le convenable, et interdit le blâmable. Car ce seront eux qui réussiront. Et ne soyez pas comme ceux qui se sont divisés et se sont mis à disputer, après que les preuves leur furent venues, et ceux-là auront un énorme châtiment} (trad relat) et le lâm dans Sa Parole {et que soit} est le lâm de l’impératif.

Et le Prophète ‎ﷺ a dit : « vous ordonnerez certainement le convenable et interdirez le blâmable, vous empêcherez l’agissement de l’injuste et vous le ramènerez à la justice et la lui imposerez sinon Allâh instaurera la haine entre vous puis Il vous maudira comme Il les a maudits ». C’est à dire comme Il a maudit les Enfants d’Israël, ceux au sujet desquels Allâh a dit {ceux des Enfants d’Israël qui n’avaient pas cru ont été maudits par la bouche de David et de Jésus fils de Marie, parce qu’ils désobéissaient et transgressaient. Ils ne s’interdisaient pas les uns aux autres ce qu’ils faisaient de blâmable} (trad relat).

Mais nous devons savoir que les ordres légiférés dans ce type de sujet ont leur endroit et il est nécessaire d’employer la sagesse. Si donc nous voyons que, par la réprobation publique, le blâmable disparaîtra et que le bien sera atteint alors nous réprouverons publiquement. Je dis que si nous voyons que par la réprobation publique, le blâmable disparaît et le bien est atteint alors la sagesse est que nous réprouvions publiquement.

Et si nous voyons que, par la réprobation publique, le mal ne disparaîtra pas ni le bien atteint, mais qu’au contraire, la sévérité du dirigeant augmentera contre ceux qui blâment et les gens de bien alors le bien est que nous réprouvions en secret.

Et c’est ainsi que les preuves sont réunies. Les preuves indiquant que la réprobation doit être publique concernent ce sur quoi nous anticipons aboutir à l’intérêt, qui est d’aboutir au bien et d’ôter le mal. Et les textes indiquant que la réprobation doit être en secret concernent ce qui, lorsque la réprobation est faite publiquement, augmentera le mal et le bien n’en découlerait pas.

Et je vous informe que ceux qui se sont égarés dans cette communauté ne se sont égarés qu’en raison du fait qu’ils prennent un côté des textes et en délaissent un autre, que ce soit dans la croyance ou la manière d’agir avec les dirigeants ou la manière d’agir avec les gens ou autre. Nous allons vous donner des exemples afin que le sujet soit clair aux présents ainsi qu’à ceux qui écoutent.

Par exemple : les khawârijs et les mu’tazilas ont vu les textes mentionnant la menace de châtiment relatif à certains péchés capitaux. Ils ont alors pris ces textes et ils ont oublié les textes mentionnant la promesse qui ouvre la porte de l’espoir. A titre d’exemple, ils disent : « si une personne tue délibérément un croyant, il est alors mécréant -selon l’opinion des khawârijs-, son sang devient licite et il demeurera éternellement en enfer ».

Et selon l’opinion des mu’tazilas, ils disent « s’il le tue, il sort de l’Islâm mais il n’entre pas dans la mécréance car nous ne pouvons statuer que c’est un mécréant. Ainsi, nous disons : il sort de l’Islâm et il est dans une station entre l’Islâm et la mécréance mais il demeurera en enfer éternellement ».

Puis, ils négligent les versets ainsi que les ahâdîths mentionnant la promesse qu’Allâh Sobhânahou wa Ta’âlã sortira du feu celui qui a dans son cœur moindre que le poids d’un grain de moutarde de foi.

D’autres s’opposent à eux disant : « quoi que l’Homme accomplisse comme péchés qui sont moindres que la mécréance, il est un croyant à la foi complète et il n’entrera jamais en enfer ». Ils disent que Sa Parole Ta’âlà {quiconque tue intentionnellement un croyant, Sa rétribution alors sera l’Enfer} (trad relat) jusqu’à la fin du verset concerne le mécréant qui tue un croyant.

Pourquoi tant ceux-ci que ceux-là sont égarés ? Car ils n’ont pris qu’un coté des textes.

De même concernant les attributs d’Allâh Azza wa Jall. Certains ont dit : « il n’est pas possible qu’Allâh Azza wa Jall vienne en personne ni descende au ciel d’ici-bas et Il n’a pas de Visage ni deux Mains ». Pourquoi ? « Car, répondent-ils, Allâh a dit {il n’y a rien qui Lui ressemble} (trad relat) et que toi, lorsque tu affirmes ces choses-là, tu as alors assimilé Allâh à la créature ». Cela est compris ? Bien.

D’autres s’opposent à eux disant : « il est attesté qu’Allâh a un Visage, deux Mains, qu’Il descend et vient. Son Visage est alors comme le nôtre, Ses Mains comme les nôtres, Sa Descente comme la nôtre et Sa Venue comme la nôtre car nous ne pouvons concevoir la venue, la main et le visage que selon ce que nous pouvons percevoir. Et Allâh ne S’est adressé à nous que selon ce que nous pouvons appréhender : ainsi, la Venue, le Visage, la Main et la Descente d’Allâh ne peuvent être que selon ce qui nous est confirmé ».

Chacun d’eux se trouve sur un bord et ils sont tous égarés car chacun n’a pris qu’un côté des textes. Nous, nous disons qu’Allâh Ta’âlà a un Visage, deux Mains, Il vient et Il descend mais ce n’est ni comme nos mains ni comme notre visage -à Allâh ne plaise- car {il n’y a rien qui Lui ressemble et c’est Lui l’Audiant, le Clairvoyant}.

Même chose concernant le conseil prodigué aux détenteurs de pouvoir. Certains veulent prendre un côté des textes -qui est la réprobation publique des détenteurs de pouvoir- quelles que soient les conséquences néfastes qui en découleraient. Et d’autres qui disent : « non, il n’est pas possible, et ce de manière absolue, de le faire publiquement. Et ce qui est obligatoire est de conseiller le détenteur de pouvoir en secret », comme cela est rapporté dans le texte mentionné par le questionneur. Et nous, nous disons : « les textes ne peuvent se contredire les uns les autres ni entrer en collision les uns contre les autres. Ainsi, la réprobation se fait publiquement devant la conséquence salutaire. Et la conséquence salutaire est que le mal disparaisse et le bien engendré. Et elle se fait en secret lorsque la réprobation publique dessert l’intérêt, n’ôte pas le mal et n’engendre pas le bien ».

Et vous savez, qu’Allâh vous bénisse, qu’il est impossible que les détenteurs de pouvoir puissent contenter tout le monde, jamais ! Même l’imâm de la mosquée : peut-il satisfaire l’assemblée (de prieurs) ? Non, certains diront il fait trop tôt la prière, d’autres qu’il la fait trop tard, d’autres qu’il l’allonge trop, d’autres qu’il l’allège trop. Et pendant l’hiver, ils entreront en conflit : il prie alors qu’il fait encore jour, il prie alors qu’il fait déjà nuit… Il ne parviendra pas faire unanimité. Ainsi, s’il réprouve publiquement le dirigeant, celui qui le déteste profitera de l’occasion et « fera d’un caillou une montagne » et le trouble éclatera. Et ne cause de tort aux gens que ce type de sujet.

Les khawârijs étaient avec Alî Ibn Abî Tâlib, qu’Allâh l’agréé, contre l’armée du Shâm. Et lorsqu’il fit la paix avec l’armée du Shâm, et ce afin d’unifier les musulmans, les khawârijs se retournèrent contre lui et lui dirent « tu es mécréant ». Et le refuge est auprès d’Allâh, ils rendirent mécréant Alî Ibn Abî Tâlib. Pourquoi ? Car il est impossible de réformer les gens vils et méprisables.

Et ces êtres vils s’affairent dans la réprobation publique contre le détenteur de l’autorité afin de parvenir à leurs objectifs. Et comme le Prophète ﷺ a dit « satan a désespéré d’être
adoré dans la péninsule arabique mais il est satisfait de la
discorde entre eux », entre qui ? Ceux qui habitent dans la péninsule, il sème la discorde entre eux jusqu’à ce que les choses en arrivent aux meurtres. Et qu’une personne rencontre son frère en Islâm -et il se peut même que ce soit son propre frère de sang ou son cousin paternel ou beau-père – et le tue. Pour quelle raison ? Pour rien !

En conclusion, nous disons qu’il incombe aux jeunes (dudit) éveil islamique de regarder les textes sous tous les angles et de ne pas se précipiter à faire quoi que ce soit avant de voir la conséquence qui en découlerait. Puisque le Prophète ﷺ a dit « que celui qui croit en Allâh et au jour dernier dise du bien ou qu’il se taise » alors fais en la balance pour toutes tes paroles ainsi que pour tous tes actes.

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